Sélectifs, à la galerie – qui aura 30 ans en 2023, et que j’ai reprise voici 18 ans -, nous l’avons toujours été…
C’est en 2010 que, pour la première fois, j’ai rejoint le comité de sélection d’une grande foire internationale, en l’occurrence celui de la Fiac, à l’invitation de Jennifer Flay et Martin Bethenod. Je m’y suis dévoué et y ai beaucoup appris. Notamment qu’aussi sincère et impartial s’envisage-t-on, on ajoute à la propension naturelle de chacun à se faire des ennemis, à perdre des amis, en complétant, pour faire bonne mesure, par celle qui conduit à n’en jamais gagner aucun !
En 2017, libéré de mes engagements précédents, j’ai accepté de rejoindre le Board of Trustees de Tefaf, la prestigieuse fondation néerlandaise. J’y ai notamment instauré le principe, la gouvernance et la mise en œuvre de comités de sélection (un pour chaque grand département artistique) – qui n’existaient pas en tant que tels auparavant – et ai, à ce titre, comme membre de l’organe afférent à la section d’Art Moderne et Contemporain, contribué à remodeler en profondeur cette spécialité à Maastricht, et à créer à partir de zéro, avec mon ami Christophe Van de Weghe, un salon éponyme chaque printemps à New York.
Entourés d’éminents confrères – dont Robert Landau, Ben Brown, Alex Logsdail ou Sharis Alexandrian -, nous nous sommes passionnément investis pour réussir un ancrage désormais solide au sein d’une institution d’essence classique qui aura été salué par la profession.
Sélectionner, ce n’est jamais juger ! Qui sommes-nous pour juger ? Sélectionner, c’est affirmer des convictions, les plus objectives possibles, en une matière par essence subjective, dans le respect du positionnement stratégique d’une foire, mais en ayant surtout conscience de l’impact de ses choix auprès de professionnels qui, ni plus ni moins que nous-mêmes, développent un programme, s’appuient sur des collaborateurs, des clients, des fournisseurs et qui engagent, à ce titre, des équilibres économiques, et souvent même des vies : En effet, être ou ne pas être sélectionné pour certaines foires, se résume parfois, aux yeux des marchands, à être ou ne pas être, tout court !
Si j’ai quitté le Board de Tefaf en mars 2021, je suis revenu au Comité de Sélection en octobre 2021, à la demande du Comité Exécutif, mais pour une durée que j’ai définie comme limitée.
Il y a peu, Marc Spiegler, Directeur Monde d’Art Basel, m’a invité à rejoindre le comité de sélection de sa foire mère à Bâle. Bâle, c’est le « Festival de Cannes » des professionnels de ma profession ! J’ai donc été honoré de cette proposition que j’ai acceptée. Comme jusqu’alors à Paris, Maastricht, ou New York, j’y consacrerai le meilleur de moi-même, veillerai en permanence à distinguer les intérêts synallagmatiques de la foire et de ses participants, d’une part, de mes intérêts personnels, d’autre part, et prendrai position conscient des enjeux, en toute indépendance, sur la base de mes connaissances des acteurs du marché et des convictions qui sont les miennes rapportées à l’ADN de la manifestation, tel que défini par son management, en pleine concertation avec les autres membres du comité.
S’est dès lors posée la question du pouvoir ! Même si je me sens parfaitement capable d’agir distinctement aux mieux des intérêts de chacune des trois foires et de ses exposants respectifs – à Maastricht, New York et Bâle -, en évitant autant que possible l’écueil de l’uniformité dans le respect de leur spécificité, une seule et même personne qui présiderait, fusse collégialement au sein de chaque instance, aux décisions de chacune d’entre elle serait inévitablement perçue par ses confrères comme dépositaire d’une responsabilité par trop exorbitante, quoique en réalité très contrôlée. Je le comprends, et en accepte l’augure.
Par souci d’équité, et même si je suis infiniment attaché à Tefaf, qui est une part de moi-même, j’ai donc informé cette dernière, comme j’en informe ici, de ma décision de céder ma place au comité de sélection moderne et contemporain.
Sélectionner, ça doit aussi pouvoir dire se soumettre à la sélection !